« (...) [ces] personnages de la scène médiatico-politique qui (...) miment la figure et le rôle de l'intellectuel (...) ils ne peuvent donner le change qu'au prix d'une présence constante dans le champ journalistique (...) et y importent des pratiques qui, en d’autres univers, auraient pour nom corruption, concussion, malversation, trafic d’influence, concurrence déloyale, collusion, entente illicite ou abus de confiance et dont le plus typique est ce qu’on appelle en français le "renvoi d’ascenseur" ». Pierre Bourdieu, « Et pourtant », Liber n°25, décembre 1995.

vendredi 18 avril 2014

Scènes de la vie mondaine.

Le 17 avril 2014 Le Monde met en ligne un article de Marion Van Renterghem consacré à un coquetèle qui a eu lieu le 3 avril 2014 et qui fait honneur à nos chers leaders.

Extraits :

Un cocktail donné par une journaliste [Sylvie Maligorne] de l’Agence France-Presse (AFP) qui tournait la page, après cinq ans à la tête du service politique, pour devenir « senior reporter ».

Sylvie Maligorne avait invité «
tout le monde », comme elle dit

«
Le premier ministre viendra », annonce-t-elle dans la journée au président de l’AFP, Emmanuel Hoog.

Des membres du nouveau gouvernement constitué la veille et autoproclamé «
gouvernement de combat » sirotaient du champagne.

Vers 19 h 30, la plupart des invités sont là quand un brouhaha annonce l’arrivée d’un gros calibre. C’est Manuel Valls. Jean-Luc Mélenchon tente de se cacher derrière un pilier, mais il n’échappe pas à la poignée de main avec le premier ministre

Manuel Valls, tout frais nommé, qui était là pour sa «
première sortie publique », comme il l’a souligné, prend la parole d’autorité, comme s’il était venu pour ça. « Nous nous sommes connus tout petits », dit-il, faisant allusion au début des années 1990 où Sylvie débutait à l’AFP alors qu’il était au cabinet de Michel Rocard. Quand il devient conseiller de Lionel Jospin à Matignon, le bureau de l’AFP se trouve juste en dessous du sien. « Quand vous entendiez mes pas un peu plus vite, vous saviez que j’allais venir vous engueuler », rappelle-t-il pour louer l’impartialité de la journaliste.

Le président Hollande arrive, décontracté, débonnaire.

Sylvie Maligorne, réputée émotive, fond en larmes. Elle le connaît depuis si longtemps, ce chef de l’Etat qu’elle tutoie et appelle François depuis ses balbutiements de député en Corrèze. «
C’était normal que François soit là », insiste une collègue qui n’arrive pas non plus à appeler le président « président ». « Je n’imaginais pas de ne pas venir, renchérit Jean-Louis Debré. On en a passé des heures ensemble, dans la salle des Quatre-Colonnes… »

«
C’était une fête privée, précise Sylvie Maligorne, organisée avec mes petits sous… »

«
Tu me prends avec Manuel ? » « François, un selfie ! » On voit François Hollande et Jean-Luc Mélenchon, frères ennemis de la gauche, qui gazouillent dans un coin. Jean-Luc qui tapote la joue de François en riant. Les UMP Valérie Pécresse et Christian Jacob qui taquinent Valls et pouffent avec le Vert Jean-Vincent Placé. Le même en grande discussion avec Sapin, Valls et le président du Conseil constitutionnel, Jean-Louis Debré. Le communiste Pierre Laurent, presque gai. Debré et Mélenchon qui font un selfie

Que se sont dit d’important Hollande et Mélenchon, qui attendait derrière son poteau son tour de poignée de main ? Leurs cinq minutes d’échange souriant ont mis l’assemblée en émoi. «
Tu nous mets en danger », lui a dit le coprésident du Parti de gauche. « Voyons-nous », lui a répondu le président. Et puis Mélenchon a pris Hollande en photo, comme tout le monde, avant de s’en aller dîner avec Jean-Vincent Placé.

«
C’était une soirée privée », répète Sylvie Maligorne. A l’AFP, agence de presse semi-publique, on est particulièrement sensible aux sarcasmes. D’autant que l’ancienne chef du service politique est connue pour son professionnalisme et son indépendance d’esprit. « Je quitte la politique, je voulais juste associer ceux qui m’ont accompagnée, et voilà… », dit-elle, blessée.

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