« (...) [ces] personnages de la scène médiatico-politique qui (...) miment la figure et le rôle de l'intellectuel (...) ils ne peuvent donner le change qu'au prix d'une présence constante dans le champ journalistique (...) et y importent des pratiques qui, en d’autres univers, auraient pour nom corruption, concussion, malversation, trafic d’influence, concurrence déloyale, collusion, entente illicite ou abus de confiance et dont le plus typique est ce qu’on appelle en français le "renvoi d’ascenseur" ». Pierre Bourdieu, « Et pourtant », Liber n°25, décembre 1995.

samedi 28 avril 2012

Franz-Olivier Giesbert fait pleins de papouilles à son ancien employeur Jean Daniel.

Franz-Olivier Giesbert dirige Le Point, un hebdomadaire pro-capitalisme et pro-libéralisme.
De 1971 à 1988 il a été l'employé de Jean Daniel au Nouvel Observateur, un hebdomadaire pro-libéralisme et pro-capitaliste.

Les 19 et 26 avril 2012 Le Point publie une longue interview de Jean Daniel réalisée par Franz-Olivier Giesbert et Christophe Ono-Dit-Bio.

Les réponses de Jean Daniel montre qu'il est bien le père spirituel des modestes, intelligents et cultivés Franz-Olivier Giesbert, Laurent Joffrin et Nicolas Demorand.

Voici quelques extraits des propos de Jean Daniel:

(...) on m'a toujours vu comme un intellectuel
(...) Rien ne vaudra jamais pour moi le sourire de bonheur de l'aimée dans la contemplation commune d'une oeuvre d'art ou lors d'une promenade à la campagne avec elle, cheveux au vent, et dont je tiens le bras nu.
(...) J'ai vu vieillir Claude Lévi-Strauss
(...) lorsque j'ai réuni une équipe merveilleuse pour faire un journal
(...) Je souhaiterais que dans certaines biographies ou dans les manuels des historiens des idées quelques étudiants en mal de thèse se souviennent que, comme le dit Léopold Senghor, je suis l'un des premiers à avoir théorisé la décolonisation ; que, comme l'a écrit René Rémond, j'ai introduit dans les médias une sensibilité nouvelle au fait religieux, ainsi que le concept de la tragédie grecque dans le conflit israélo-palestinien. Et je n'ai jamais séparé du journalisme la littérature, l'histoire et la philosophie. Montaigne, Diderot, Gide et Bergson, ces maîtres ont été constamment présents.
(...) Simone de Beauvoir a tout fait pour coucher avec lui [Albert Camus], mais elle n'était pas son genre, comme il me l'a dit un jour [Entre nous, elle n'était pas le mien non plus...].


"(...) je crois bien que si Beauvoir avait réussi à coucher avec lui [Albert Camus], Sartre, qui tolérait l'éclectisme de ses amours - c'était une convention entre eux, comme vous savez - en aurait été jaloux... (...) Son amitié était à la fois chaleureuse, stimulante et attentive. Il a publié mon premier livre dans sa collection et il a justifié publiquement son choix. À Caliban, dans la joie, puis à L'Express, dans le drame, nous ne nous sommes pas quittés. J'avais besoin de son avis. Je me suis toujours senti en insécurité lorsque je le devinais en désaccord avec moi. Après son prix Nobel, comme je lui manifestais mon inaltérable fidélité en dépit de nos désaccords sur l'Algérie, il m'a écrit : "L'important est que nous soyons vous et moi déchirés."
(...) Notre rôle au Portugal a été considérable si vous lisez les Mémoires de Mario Soares. Je suis l'homme de trois ruptures : avec les militants de l'Algérie française, avec les staliniens et avec les ultrasionistes.
(...) "Si nous étions attaqués, je m'adresserais à l'Otan", m'avait dit Berlinguer.
(...) Ma guerre, c'est dans trois nouvelles intitulées "L'ami anglais" que je l'ai racontée. Vous avez eu l'obligeance de noter qu'il y avait un personnage, le Maltais, qui était destiné à rester. C'est dans Le Point de Claude Imbert que François Nourrisier a publié un immense article célébrant le romancier que révélaient Les carnets...
(...) N'oubliez pas que je n'ai pas hérité un journal, je l'ai créé, et ça a été un véritable apostolat. J'étais comme le responsable d'un monastère. Quoi que je fisse, je pensais toujours au journal.
(...) ces romans que je n'ai pas écrits, je les ai vécus.Rien que ces derniers mois, j'ai vécu trois événements d'un romanesque troublant. D'abord, je suis retourné aux États-Unis, où j'ai eu la visite d'un agent de la CIA qui m'a dit que Castro, qui a présenté les deux premiers tomes de ses Mémoires, voulait me voir. Et il m'apprend une histoire invraisemblable : Castro, que j'ai rencontré à La Havane la veille de l'assassinat de Kennedy à Dallas, pensait que j'étais envoyé par Kennedy pour le tuer, lui, Castro ! Ensuite, je vais au Portugal. Antonio Lobo Antunes, un immense écrivain, m'invite chez lui. Et il me montre, dans sa bibliothèque, reliés, tous les articles que j'ai écrits sur l'Algérie pendant sept ans. Il me dit : "Toutes les semaines, on les attendait comme on attend le nouveau chapitre d'un roman. Un roman sur la décolonisation et sur la liberté, le roman qui a inspiré la révolution des oeillets." Enfin, autre voyage à New York, pour une conférence sur Camus à la New York University. Après la conférence, alors que je signe mes livres, un homme vient me voir, portant beau. Il me dit : "Ne me dédicacez pas votre livre, on verra si je le mérite." Il me demande si j'ai un moment pour parler tranquillement, dehors. Je sors avec lui, et il m'annonce : "C'est moi qui ai tiré sur vous à Bizerte en juillet 1961. J'étais un jeune parachutiste. Depuis, j'ai lu tous vos livres. Et je me dis que j'ai failli tuer l'auteur que j'admirais." Voilà ce qu'il me dit. En quelques mois, ces trois pans de mon passé qui reviennent me font dire que le roman est là quand même... 
(...) "

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