« (...) [ces] personnages de la scène médiatico-politique qui (...) miment la figure et le rôle de l'intellectuel (...) ils ne peuvent donner le change qu'au prix d'une présence constante dans le champ journalistique (...) et y importent des pratiques qui, en d’autres univers, auraient pour nom corruption, concussion, malversation, trafic d’influence, concurrence déloyale, collusion, entente illicite ou abus de confiance et dont le plus typique est ce qu’on appelle en français le "renvoi d’ascenseur" ». Pierre Bourdieu, « Et pourtant », Liber n°25, décembre 1995.

mardi 11 juin 2013

La droite est au pouvoir (48).

 Le 10 juin 2013 le site du Monde met en ligne un texte de Raphaëlle Bacqué dont la naïveté permet de voir que le (très petit) monde dans lequel évolue Stéphane Richard ( (...) ancien conseiller de Dominique Strauss-Kahn (...) vieil ami [de] Pierre Moscovici (...) [et] qui figurait parmi les donateurs des associations de financement de François Hollande et de Manuel Valls, juste avant la primaire socialiste d'octobre 2011 (...) )   est très fermé, fort compact et bien ancré à droite.
Extraits :

" En découvrant, jeudi 6 juin sur le site du Monde qu'Arnaud Montebourg prévoyait déjà de demander sa tête, en cas de mise en examen dans l'affaire Tapie, Stéphane Richard a --- envoyé un SMS --- au ministre : "Je suis devant 1 200 de mes cadres. Que dois-je leur dire ?" --- le patron de France Télécom, nommé à la tête de l'entreprise publique par Nicolas Sarkozy en 2011, a également envoyé un message à François Hollande et à son vieil ami, le ministre de l'économie, Pierre Moscovici, pour s'assurer de leur soutien. Et --- le ministre du redressement productif --- renvoyait un texto : "Je n'ai jamais tenu ces propos et je vais faire un démenti."
Entendu lundi 10 juin par la brigade financière, en tant qu'ancien directeur de cabinet de Christine Lagarde au ministère de l'économie, Stéphane Richard ---
Le 8 avril, lors d'un rendez-vous à l'Elysée, François Hollande l'avait assuré : "Je ne demanderai pas la démission de Mme Lagarde du FMI si elle est mise en examen. Par parallélisme, je ne demanderai pas non plus la tienne." ---
les juges ont mis en examen, le 29 mai, Pierre Estoup, l'un des trois arbitres de l'affaire Tapie, pour "escroquerie en bande organisée", et --- chacun attend --- de savoir qui constitue la "bande" ayant permis d'accorder à l'homme d'affaires --- 241 millions d'euros (sans les intérêts) et 45 millions non imposables au titre du "préjudice moral", payés par l'Etat, afin de clore le contentieux qui l'opposait depuis 1994 au Crédit lyonnais ? 
--- "On ne déstabilise pas une entreprise de 170 000 personnes, s'insurge Stéphane Richard, et cela ne se passera pas comme ça !" Lui qui figurait parmi les donateurs des associations de financement de François Hollande et de Manuel Valls, juste avant la primaire socialiste d'octobre 2011, mais a voté Nicolas Sarkozy à la présidentielle huit mois plus tard --- 
[Stéphane Richard] fut à Bercy un interlocuteur politique essentiel. C'est lui qui recevait les patrons, suivait tous les dossiers sensibles avec le secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant, et son adjoint, François Pérol --- "Il était comme un vice-ministre, reconnaît son ami le banquier d'affaires, Philippe Villin. Affable, politique et ne se laissant pas submerger par la machine. Sur son bureau, il n'y avait d'ailleurs pas un parapheur, mais il disposait d'un haut fonctionnaire, comme un esclave supérieur de la maison, sur qui s'appuyer." --- C'est cette latitude rare qui le place aujourd'hui sous le regard de la justice. C'est ce pouvoir passé qui le met en position de fusible potentiel, alors que François Hollande a décidé de ne pas déstabiliser la présidente du FMI, seule Française à conserver un poste de haut niveau dans une instance internationale après la chute --- de Dominique Strauss-Kahn et alors que le mandat de Pascal Lamy à la tête de l'Organisation mondiale du commerce arrive à échéance fin août. C'est ce rôle qui oblige Stéphane Richard à se défendre du soupçon d'avoir été --- le rouage d'une alliance supposée entre le pouvoir sarkozyste de l'époque et Bernard Tapie, ancien ministre de François Mitterrand.
En mai 2007, Stéphane Richard avait été --- "froissé" de se retrouver directeur de cabinet du ministre de l'économie Jean-Louis Borloo puis --- de Christine Lagarde qui l'avait remplacé à Bercy. Il s'attendait à obtenir un secrétariat d'Etat ou --- à rejoindre l'Elysée. "J'aurais voulu le poste qu'a occupé François Pérol", reconnaît-il aujourd'hui. Mais cet ancien conseiller de Dominique Strauss-Kahn n'est alors ni assez introduit dans les cercles de droite pour rejoindre le saint des saints, ni doté d'une notoriété suffisante au sein des cercles de gauche pour faire de sa nomination au gouvernement Fillon une --- prise de guerre. Au soir de l'élection présidentielle, s'il est passé au QG de campagne de Nicolas Sarkozy, il ne figure pas sur la liste des invités du Fouquet's ---. "Nicolas l'aimait bien, mais il n'était pas un membre de sa garde prétorienne", affirme aujourd'hui Alain Minc, qui n'a jamais tout à fait apprécié ce charmeur jugé trop nonchalant à son goût. --- Stéphane Richard a --- noué une relation d'amitié avec Nicolas Sarkozy depuis une dizaine d'années. Les deux hommes se sont rencontrés dans les années 1990, au cœur de ces milieux d'affaires qui goûtent alors l'entregent du maire de Neuilly sans dédaigner le brio du ministre socialiste de Lionel Jospin, Dominique Strauss-Kahn. Stéphane Richard se situe --- dans cet entre-deux, séduit par l'énergie de celui qui, aux côtés d'Edouard Balladur, a contesté la candidature de Jacques Chirac en 1995, mais convaincu par l'intelligence du héraut de la gauche moderne, véritable héritier à ses yeux du Michel Rocard qui l'avait convaincu d'adhérer au PS un an avant l'élection de François Mitterrand à l'Elysée. En 1991, ce diplômé d'HEC – comme DSK –, énarque, inspecteur des finances, a croisé la route de Strauss-Kahn au ministère de l'industrie, où il était chargé des entreprises high-tech, sous la férule du directeur des stratégies industrielles Didier Lombard... le futur patron de France Télécom qu'il remplacera des années plus tard. --- "L'aisance de Dominique, son intelligence, Anne Sinclair... C'est l'une des personnalités les plus brillantes que j'ai rencontrées dans ma vie", dit-il. C'est le début d'une alliance que Nicolas Sarkozy ne cherchera jamais à contrer. Comme s'il devinait qu'au fond, cette gauche-là peut s'accommoder avec lui. A l'Elysée, lorsqu'il pousse en 2007 la candidature de DSK à la tête du FMI, Nicolas Sarkozy charge Stéphane Richard au ministère de l'économie d'organiser la cellule de hauts fonctionnaires de Bercy qui soutiendra la campagne internationale du candidat français. --- lorsque, en 2011, quelques mois avant l'affaire du Sofitel, DSK s'inquiète d'être écouté, c'est à Stéphane Richard, devenu patron du groupe de télécommunications qu'il demande – "en vain", affirme ce dernier – de vérifier ses lignes téléphoniques ? Aujourd'hui encore, malgré le scandale et les paparazzi, le PDG d'Orange ne se cache pas de continuer à rencontrer l'ancien espoir de la gauche. --- Stéphane Richard doit --- une grande partie de sa carrière à la droite. En 1992 --- a rejoint la Compagnie générale des eaux (CGE), happé par la séduction du patron le plus flamboyant de l'époque, Jean-Marie Messier. Ce dernier confie à sa nouvelle recrue le redressement du pôle immobilier de la CGE. Il lui demande aussi, à la fin 1995, que l'acquisition du groupe Georges-V soit finalisée par Nicolas Sarkozy, qui, après la défaite d'Edouard Balladur, a dû reprendre ses activités d'avocat au sein du cabinet Arnaud Claude dont il est l'associé. A l'ENA, au sein de la promotion Fernand Braudel, Stéphane Richard avait déjà côtoyé Nicolas Bazire, l'autre fer de lance de la campagne balladurienne. --- Mais l'avocat a eu tôt fait d'inviter le strauss-kahnien à déjeuner. Désormais, il va le regarder avec intérêt bâtir sa fortune. Car Stéphane Richard, qui fait équipe avec un spécialiste de l'immobilier, Alain Dinin, a proposé de racheter à travers un LBO (leverage buy out), l'énorme pôle immobilier dont Messier a décidé, en 1999, de se débarrasser ---. Le duo a investi 660 000 euros chacun pour créer, en association avec une dizaine de cadres de Vivendi, Nexity et, en revendant ses parts, Stéphane Richard a fait une formidable plus-value que Dinin évalue, calculette en main, "à plus de 20 millions d'euros". Chez Veolia où Henri Proglio a recruté, en 2003, Stéphane Richard pour diriger la branche transports, le patron millionnaire avoue sans fard que son salaire "sert juste à payer son ISF". --- "Tu as bien réussi, tu es riche, peut-être un jour j'y arriverai comme toi. C'est la France que j'aime !", félicite, en octobre 2006, le ministre de l'intérieur Nicolas Sarkozy en décorant, place Beauvau, son ami de la légion d'honneur. Stéphane Richard est de tous les anniversaires du futur candidat à la présidentielle. Il continue pourtant de fréquenter son possible rival, Dominique Strauss-Kahn, en campagne pour les primaires socialistes qui doivent avoir lieu un mois plus tard. "Mon pire cauchemar serait de devoir choisir entre Dominique et toi lors du second tour de la présidentielle", plaisante-t-il. Mais Nicolas Sarkozy préfère en rire : "Au moins, tu n'as pas choisi le plus bête..." La défaite de DSK face à Ségolène Royal va pourtant trancher tous les doutes. "Tu viendras travailler avec moi", a proposé Nicolas Sarkozy. Est-ce parce que Stéphane Richard fait alors l'objet d'un redressement fiscal de 660 000 euros, qu'il réglera en octobre 2007, que le nouveau président est resté vague sur la place qu'il pourrait avoir dans son dispositif ? C'est en tout cas Jean-Louis Borloo, tout juste nommé ministre de l'économie, qui appelle le premier le patron pour diriger son cabinet. Quelques jours après son arrivée à Bercy, le ministre envoie Stéphane Richard accueillir pour un petit déjeuner... Bernard Tapie, dont il fut longtemps l'avocat. C'est la première fois que Richard rencontre le businessman. Une autre affaire, celle de l'arbitrage, va alors démarrer... "

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