Le 10 juin 2013 le site du Monde met en ligne un texte de Raphaëlle Bacqué dont la naïveté permet de voir que le (très petit) monde dans lequel évolue Stéphane Richard ( (...) ancien conseiller
de Dominique Strauss-Kahn (...) vieil ami [de] Pierre Moscovici (...) [et] qui figurait parmi les donateurs des
associations de financement de François Hollande et de Manuel Valls,
juste avant la primaire socialiste d'octobre 2011 (...) ) est très fermé, fort compact et bien ancré à droite.
Extraits :
" En découvrant, jeudi 6 juin sur le site du Monde qu'Arnaud Montebourg
prévoyait déjà de demander sa tête, en cas de mise en examen dans
l'affaire Tapie, Stéphane Richard a --- envoyé un SMS --- au ministre :
"Je suis devant 1 200 de mes cadres. Que dois-je leur dire ?" --- le
patron de France Télécom, nommé à la tête de l'entreprise publique par
Nicolas Sarkozy en 2011, a également envoyé un message à François
Hollande et à son vieil ami, le ministre de l'économie, Pierre
Moscovici, pour s'assurer de leur soutien. Et --- le ministre du
redressement productif --- renvoyait un texto : "Je n'ai jamais tenu ces
propos et je vais faire un démenti."
Entendu lundi 10 juin par la
brigade financière, en tant qu'ancien directeur de cabinet de Christine
Lagarde au ministère de l'économie, Stéphane Richard ---
Le 8 avril,
lors d'un rendez-vous à l'Elysée, François Hollande l'avait assuré : "Je
ne demanderai pas la démission de Mme Lagarde du FMI si elle est mise
en examen. Par parallélisme, je ne demanderai pas non plus la tienne."
---
les juges ont mis en examen, le 29 mai, Pierre Estoup, l'un des
trois arbitres de l'affaire Tapie, pour "escroquerie en bande
organisée", et --- chacun attend --- de savoir qui constitue la "bande"
ayant permis d'accorder à l'homme d'affaires --- 241 millions d'euros
(sans les intérêts) et 45 millions non imposables au titre du "préjudice
moral", payés par l'Etat, afin de clore le contentieux qui l'opposait
depuis 1994 au Crédit lyonnais ?
--- "On ne déstabilise pas une
entreprise de 170 000 personnes, s'insurge Stéphane Richard, et cela ne
se passera pas comme ça !" Lui qui figurait parmi les donateurs des
associations de financement de François Hollande et de Manuel Valls,
juste avant la primaire socialiste d'octobre 2011, mais a voté Nicolas
Sarkozy à la présidentielle huit mois plus tard ---
[Stéphane Richard] fut à Bercy un
interlocuteur politique essentiel. C'est lui qui recevait les patrons,
suivait tous les dossiers sensibles avec le secrétaire général de
l'Elysée, Claude Guéant, et son adjoint, François Pérol --- "Il était
comme un vice-ministre, reconnaît son ami le banquier d'affaires,
Philippe Villin. Affable, politique et ne se laissant pas submerger par
la machine. Sur son bureau, il n'y avait d'ailleurs pas un parapheur,
mais il disposait d'un haut fonctionnaire, comme un esclave supérieur de
la maison, sur qui s'appuyer." --- C'est cette latitude rare qui le
place aujourd'hui sous le regard de la justice. C'est ce pouvoir passé
qui le met en position de fusible potentiel, alors que François Hollande
a décidé de ne pas déstabiliser la présidente du FMI, seule Française à
conserver un poste de haut niveau dans une instance internationale
après la chute --- de Dominique Strauss-Kahn et alors que le mandat de
Pascal Lamy à la tête de l'Organisation mondiale du commerce arrive à
échéance fin août. C'est ce rôle qui oblige Stéphane Richard à se
défendre du soupçon d'avoir été --- le rouage d'une
alliance supposée entre le pouvoir sarkozyste de l'époque et Bernard
Tapie, ancien ministre de François Mitterrand.
En mai 2007, Stéphane
Richard avait été --- "froissé" de se retrouver directeur de cabinet du
ministre de l'économie Jean-Louis Borloo puis --- de Christine Lagarde
qui l'avait remplacé à Bercy. Il s'attendait à obtenir un secrétariat
d'Etat ou --- à rejoindre l'Elysée. "J'aurais voulu le poste qu'a occupé
François Pérol", reconnaît-il aujourd'hui. Mais cet ancien conseiller
de Dominique Strauss-Kahn n'est alors ni assez introduit dans les
cercles de droite pour rejoindre le saint des saints, ni doté d'une
notoriété suffisante au sein des cercles de gauche pour faire de sa
nomination au gouvernement Fillon une --- prise de guerre. Au soir de
l'élection présidentielle, s'il est passé au QG de campagne de Nicolas
Sarkozy, il ne figure pas sur la liste des invités du Fouquet's ---.
"Nicolas l'aimait bien, mais il n'était pas un membre de sa garde
prétorienne", affirme aujourd'hui Alain Minc, qui n'a jamais tout à fait
apprécié ce charmeur jugé trop nonchalant à son goût. --- Stéphane
Richard a --- noué une relation d'amitié avec Nicolas Sarkozy depuis une
dizaine d'années. Les deux hommes se sont rencontrés dans les années
1990, au cœur de ces milieux d'affaires qui goûtent alors l'entregent du
maire de Neuilly sans dédaigner le brio du ministre socialiste de
Lionel Jospin, Dominique Strauss-Kahn. Stéphane Richard se situe ---
dans cet entre-deux, séduit par l'énergie de celui qui, aux côtés
d'Edouard Balladur, a contesté la candidature de Jacques Chirac en 1995,
mais convaincu par l'intelligence du héraut de la gauche moderne,
véritable héritier à ses yeux du Michel Rocard qui l'avait convaincu
d'adhérer au PS un an avant l'élection de François Mitterrand à
l'Elysée. En 1991, ce diplômé d'HEC – comme DSK –, énarque, inspecteur
des finances, a croisé la route de Strauss-Kahn au ministère de
l'industrie, où il était chargé des entreprises high-tech, sous la
férule du directeur des stratégies industrielles Didier Lombard... le
futur patron de France Télécom qu'il remplacera des années plus tard.
--- "L'aisance de Dominique, son intelligence, Anne Sinclair... C'est
l'une des personnalités les plus brillantes que j'ai rencontrées dans ma
vie", dit-il. C'est le début d'une alliance que Nicolas Sarkozy ne
cherchera jamais à contrer. Comme s'il devinait qu'au fond, cette
gauche-là peut s'accommoder avec lui. A l'Elysée, lorsqu'il pousse en
2007 la candidature de DSK à la tête du FMI, Nicolas Sarkozy charge
Stéphane Richard au ministère de l'économie d'organiser la cellule de
hauts fonctionnaires de Bercy qui soutiendra la campagne internationale
du candidat français. --- lorsque, en 2011, quelques mois avant
l'affaire du Sofitel, DSK s'inquiète d'être écouté, c'est à Stéphane
Richard, devenu patron du groupe de télécommunications qu'il demande –
"en vain", affirme ce dernier – de vérifier ses lignes téléphoniques ?
Aujourd'hui encore, malgré le scandale et les paparazzi, le PDG d'Orange
ne se cache pas de continuer à rencontrer l'ancien espoir de la gauche.
--- Stéphane Richard doit --- une grande partie de sa carrière à la
droite. En 1992 --- a rejoint la Compagnie générale des eaux (CGE),
happé par la séduction du patron le plus flamboyant de l'époque,
Jean-Marie Messier. Ce dernier confie à sa nouvelle recrue le
redressement du pôle immobilier de la CGE. Il lui demande aussi, à la
fin 1995, que l'acquisition du groupe Georges-V soit finalisée par
Nicolas Sarkozy, qui, après la défaite d'Edouard Balladur, a dû
reprendre ses activités d'avocat au sein du cabinet Arnaud Claude dont
il est l'associé. A l'ENA, au sein de la promotion Fernand Braudel,
Stéphane Richard avait déjà côtoyé Nicolas Bazire, l'autre fer de lance
de la campagne balladurienne. --- Mais
l'avocat a eu tôt fait d'inviter le strauss-kahnien à déjeuner.
Désormais, il va le regarder avec intérêt bâtir sa fortune. Car Stéphane
Richard, qui fait équipe avec un spécialiste de l'immobilier, Alain
Dinin, a proposé de racheter à travers un LBO (leverage buy out),
l'énorme pôle immobilier dont Messier a décidé, en 1999, de se
débarrasser ---. Le duo a investi 660 000 euros chacun pour créer, en
association avec une dizaine de cadres de Vivendi, Nexity et, en
revendant ses parts, Stéphane Richard a fait une formidable plus-value
que Dinin évalue, calculette en main, "à plus de 20 millions d'euros".
Chez Veolia où Henri Proglio a recruté, en 2003, Stéphane Richard pour
diriger la branche transports, le patron millionnaire avoue sans fard
que son salaire "sert juste à payer son ISF". --- "Tu
as bien réussi, tu es riche, peut-être un jour j'y arriverai comme toi.
C'est la France que j'aime !", félicite, en octobre 2006, le ministre
de l'intérieur Nicolas Sarkozy en décorant, place Beauvau, son ami de la
légion d'honneur. Stéphane Richard est de tous les anniversaires du
futur candidat à la présidentielle. Il continue pourtant de fréquenter
son possible rival, Dominique Strauss-Kahn, en campagne pour les
primaires socialistes qui doivent avoir lieu un mois plus tard. "Mon
pire cauchemar serait de devoir choisir entre Dominique et toi lors du
second tour de la présidentielle", plaisante-t-il. Mais Nicolas Sarkozy
préfère en rire : "Au moins, tu n'as pas choisi le plus bête..." La
défaite de DSK face à Ségolène Royal va pourtant trancher tous les
doutes. "Tu viendras travailler avec moi", a proposé Nicolas Sarkozy.
Est-ce parce que Stéphane Richard fait alors l'objet d'un redressement
fiscal de 660 000 euros, qu'il réglera en octobre 2007, que le nouveau
président est resté vague sur la place qu'il pourrait avoir dans son
dispositif ? C'est en tout cas Jean-Louis Borloo, tout juste
nommé ministre de l'économie, qui appelle le premier le patron pour
diriger son cabinet. Quelques jours après son arrivée à Bercy, le
ministre envoie Stéphane Richard accueillir pour un petit déjeuner...
Bernard Tapie, dont il fut longtemps l'avocat. C'est la première fois
que Richard rencontre le businessman. Une autre affaire, celle de
l'arbitrage, va alors démarrer... "
« (...) [ces] personnages de la scène médiatico-politique qui (...) miment la figure et le rôle de l'intellectuel (...) ils ne peuvent donner le change qu'au prix d'une présence constante dans le champ journalistique (...) et y importent des pratiques qui, en d’autres univers, auraient pour nom corruption, concussion, malversation, trafic d’influence, concurrence déloyale, collusion, entente illicite ou abus de confiance et dont le plus typique est ce qu’on appelle en français le "renvoi d’ascenseur" ». Pierre Bourdieu, « Et pourtant », Liber n°25, décembre 1995.
mardi 11 juin 2013
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