« (...) [ces] personnages de la scène médiatico-politique qui (...) miment la figure et le rôle de l'intellectuel (...) ils ne peuvent donner le change qu'au prix d'une présence constante dans le champ journalistique (...) et y importent des pratiques qui, en d’autres univers, auraient pour nom corruption, concussion, malversation, trafic d’influence, concurrence déloyale, collusion, entente illicite ou abus de confiance et dont le plus typique est ce qu’on appelle en français le "renvoi d’ascenseur" ». Pierre Bourdieu, « Et pourtant », Liber n°25, décembre 1995.

mercredi 26 juin 2013

Thierry Mandon : un député " socialiste " amoureux des patrons. La droite est au pouvoir (58).

Le 26 juin 2013 le site du Nouvel Economiste met en ligne une interview du député " socialiste " Thierry Mandon. C'est l'occasion pour cet élu de prêcher la bonne parole capitaliste.

" (...)  Nous avons voté la création d’un Crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE), qui est un abaissement de charge des entreprises de l’ordre de 20 milliards d’euros. L’équivalent de la moitié de l’impôt sur les sociétés, ce qui est absolument considérable ! Si la majorité a voté ce CICE, c’est bien la démonstration qu’il y avait la conscience d’un problème réel sur le taux de marge des entreprises. Il fallait aider les entreprises à reconstituer un peu de cette marge. (...) [un cadeau de 20 milliards d'euros aux entreprises, ça c'est de gauche. Et qualifier les cotisations de "charges" c'est reprendre le langage éculé du patronat]

Le dispositif est particulièrement simple. Il s’agit de baisser de 4 % les charges salariales sur les salaires de moins de deux fois le SMIC, moins de 3 500 euros. Même un enfant pourrait le faire. (...) le dispositif, je le répète, est simplissime : 4 % sur les salaires en 2013 puis 6 % en 2014. (...) le procédé retenu est le plus simple qui soit. Ensuite, il est “intelligent” (...) 20 milliards d’euros de baisses de charges aux entreprises. (...) [ceux qui n'ont pas compris le génial mécanisme du CICE sont des cons irrécupérables ...]


le CICE laisse à l’entreprise le libre choix de l’usage qu’elle peut faire de la réduction de ses coûts. Elle peut décider d’embaucher, elle peut décider de baisser ses prix, elle peut décider d’investir. Vous voyez, cette formule donne de la marge aux entreprises, elles en font ce qu’elles veulent. (...) [Thierry Mandon dit aux patrons : vous faites ce que vous voulez de l'argent que vous ne versez plus en cotisations... vous pouvez même vous augmenter]

L’ANI, c’est la nouvelle capacité qu’on donne aux entreprises de s’adapter rapidement à des baisses de régime de l’activité, à des difficultés passagères, y compris par la souplesse sur les salaires. [comprendre : réductions de salaires] 
Je ne suis pas sûr qu’il y a 10 ans le PS aurait voté ce genre de dispositif ; comme d’ailleurs les 20 milliards du CICE. Il peut y avoir des stratégies d’adaptation des entreprises, qui passent par des suppressions d’emplois dans certains territoires, mais à condition de les accompagner. Si je prends la décision de Michelin de fermer une usine à Joué-lès-Tours, c’est extrêmement brutal pour le bassin d’emploi. Cette brutalité, il faut la gérer, et les pouvoirs publics ont une responsabilité. [Patrons, vous pouvez licencier tant que vous voulez, les " socialistes " sont là pour " vendre " vos décisions à vos victimes] 
En même temps, j’interprète la décision de Michelin comme un acte de confiance dans l’économie française. Qu’est-ce qu’ils font ? Ils ne ferment pas parce qu’ils sont en difficulté, ils ferment parce qu’ils réinvestissent pour les années qui viennent dans un outil de production de pneus en France. Ils vont réembaucher, donc ils croient qu’on peut continuer durablement à produire en France et être compétitif. [Mandon ose tout, c'est même à cela qu'on le reconnaît. Il faut une sacrée dose de culot pour présenter la fermeture d'un site de production comme " un acte de confiance dans l’économie française "] 

Vous voyez que la culture macroéconomique de la majorité bouge ! [et Mandon est fier de lui]

Comment alors expliquer l’opinion de beaucoup de chefs d’entreprise que la gauche s’en prend sinon à l’entreprise, du moins à l’esprit d’entreprise ? Je pense que c’est le paradoxe de l’état culturel dans lequel se trouve la gauche vis-à-vis de l’entreprise. Au moment où, entre guillemets, on se réconcilie en termes macroéconomiques avec les entreprises du pays, je trouve qu’on s’en éloigne trop au plan microéconomique. La majorité a du mal à définir des politiques nouvelles qui facilitent, qui simplifient, qui améliorent la vie quotidienne des entreprises. On pense d’une certaine manière que l’action en direction des entreprises est essentiellement macroéconomique. A mon avis, ce qu’il faut inventer, c’est un nouvel équilibre, une politique d’intervention de gauche, moderne, en direction des entreprises. Il faut trouver ce nouvel équilibre entre ce qui relève de la macroéconomie et ce qui relève de la microéconomie – la vie quotidienne des entreprises. Le PS n’a pas assez le discours de lentrepreneuriat, de la création, de l’innovation, du réseau, de la souplesse, de la mobilité. Toutes ces valeurs-là ne sont pas macroéconomiques, mais ce sont des valeurs essentielles pour la compétitivité des entreprises. [pour Mandon les " socialistes " ne seront jamais assez soumis aux injonctions des patrons]

(...) Il y a quelques années une nouvelle dynamique est apparue, très salutaire pour les entreprises, autour de la notion de cluster, de pôle de compétitivité. (...) Il faut redéfinir ce que sont les pôles de compétitivité, détecter les plus efficaces et leur donner plus de pouvoir. Il faut associer beaucoup plus à l’intérieur de ces pôles les grands donneurs d’ordre, les PME-PMI, les pôles universitaires territorialisés. Une nouvelle politique territoriale est à inventer, qui tienne autant de l’aménagement du territoire que de la politique économique et de la politique de recherche à l’université. Il faut pousser à fond la logique des clusters. C’est la seule chance de développement à la fois pour le territoire et pour la performance des PME-PMI. (...) il s’agit de comprendre les freins microéconomiques et fiscaux à la croissance des petites entreprises. (...) [couplet anti-fiscal]
Il y a plein de sujets lourds, même sur les seuils. Après tout, il faudrait qu’il y ait une négociation sociale avec les partenaires patronaux et syndicaux sur la question des seuils. Les seuils, cela a été inventé il y a 50 ans, peut-être que cela demande des adaptations. Que les partenaires sociaux en débattent librement. Il ne s’agit pas de diminuer les droits des salariés, mais de réfléchir à ces sujets-là. (...) [les patrons seraient tellement plus heureux sans syndicalistes, sans comités d'entreprises, sans représentants du personnel, sans Code du travail]

mieux organiser les politiques de transfert de technologie, de valorisation, de diffusion de la science dans les PME-PMI. (...) Aux Etats-Unis, vous savez comme cela se passe. Un universitaire fait de la recherche dans son laboratoire, il trouve un truc, il monte sa boîte, elle marche, il la vend, il retourne dans un laboratoire. Donc, les parcours de la recherche publique à la création d’entreprise doivent être beaucoup plus fluides.(...) [c'est bien connu, un universitaire ça trouve des trucs] 
Aux Etats-Unis, selon une étude d’Ernst and Young, 100 % de la création d’emplois est le fait d’entreprises de moins de cinq ans. C’est extraordinaire ! (...) [Mandon prend ses sources chez un cabinet d'audit au service des grandes entreprises.]
Je pense que cette future loi sur l’innovation – soit en fin d’année, soit début 2014 – peut être un message majeur en direction tant du monde de l’entreprise que des nouvelles générations. Il faudra bien la préparer avec les partenaires sociaux. J’en ai parlé avec le président de la République. [Mandon a de bonnes fréquentations] (...)  
il faut associer étroitement les entreprises à la définition des chantiers prioritaires – qu’est-ce qui est important – et à la mise en œuvre des chantiers de simplification.(...) Si on s’en donne les moyens, je garantis qu’avec un plan tri-annuel il est possible de baisser de 80 % la charge que représente aujourd’hui la complexité administrative auprès de n’importe quelle entreprise. (...) Je suis persuadé que le chantier de simplification est un chantier de réconciliation entre les entreprises et les fonctionnaires. (...) on va dire aux entreprises “regardez, les fonctionnaires ne sont pas vos ennemis ; au contraire, c’est grâce à eux que vous allez gagner en compétitivité”. Parce que sur un certain nombre de moments-clés de la vie de votre entreprise, ils vont vous aider à aller plus vite et à ce que cela vous coûte moins cher. (...) [entreprises/fonctionnaires, main dans la main. Si tous les gars du monde se donnaient la main ...] 
l’objectif de gains de compétitivité par la baisse du coût des charges administratives. (...) Le sursaut, le rebond de compétitivité de l’économie nationale (...)

Avant tout j’ai une conviction absolue, je pense qu’on ne peut pas croire et vouloir le progrès social, ce qui est mon combat puisque je suis socialiste, si on n’est pas “business comprehensive”. Attention ce n’est pas du “business friendly”, le mot à la mode ; je ne suis pas amical avec le business parce que le business a sa façon de voir. En revanche, être “business comprehensive” c’est comprendre ce qui se passe dans l’activité économique dans son ensemble. Si on n’a pas de politique pour tonifier cette dimension, il n’est pas possible d’imaginer durablement du progrès social. Ce n’est peut-être pas révolutionnaire, mais plus efficace sûrement. " [Feu d'artifice mandonesque : le progrès c'est la soumission, l'émancipation c'est la servitude].

L'interview de Mandon est parue dans une rubrique " Vu d'en haut " .
Une chose est sûre, le " business comprehensive " Mandon prend de haut les gens de gauche.


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